L’humeur du 26 janvier : Question de travail.

FFAujourd’hui achève, sous le magnifique chapiteau du Cirque Phénix, la 35e édition du Festival mondial du Cirque de Demain. Sélectionnés par Alain Pacherie et Pascal Jacob, les meilleurs artistes de la jeune génération circassienne y rivalisent de talent, de force et d’inventivité. Je me disais, en les admirant hier, que la plupart d’entre eux n’étaient même pas nés lorsque j’ai, pour la première fois, assisté au Festival – c’était en 1986, alors dans le cadre historique du Cirque d’Hiver de Paris… Une dizaine d’années plus tôt, Dominique Mauclair – qui, cette année, préside le jury – avait eu l’idée salutaire de cette réunion internationale des espoirs du cirque.

J’ai assisté, depuis lors, à vingt-trois ou vingt-quatre éditions de ce merveilleux festival ; et toujours j’en ressors ébloui, heureux et – pour quelques heures au moins – confiant dans les prodiges accomplis par le travail, la créativité, le dépassement de soi. Toutes les grandes disciplines – sportives, artistiques, artisanales, intellectuelles – exigent de telles qualités, requièrent des meilleurs la concentration, l’ascèse et – osons le mot – le sacrifice. Le résultat est souvent sublime, et vient couronner la somme inouïe des efforts consentis. D’où vient-il, dès lors, que ces notions – que ces valeurs – soient devenues tantôt ridicules, tantôt suspectes, aux yeux de notre société ? Comment expliquer le mouvement de recul que l’on y perçoit généralement, dès qu’il en est question ? La sécurité, le repos, le dialogue, la douceur, le loisir, y sont plébiscités ; le risque, l’effort, la discipline, la rigueur, le travail, rejetés ou bien moqués… Assimilés même à une forme de ringardise.

J’ai fait souvent, à ce propos, une expérience étonnante. La question m’est très souvent posée des secrets de fabrication de notre rendez-vous radiophonique Au cœur de l’histoire. « Comment faites-vous, me demande-t-on sans cesse, pour sauter aussi facilement, de jour en jour, d’un sujet à un autre ? » Si je veux entamer un échange, je réponds : « Question de passion, d’enthousiasme » – les gens sont ravis et s’épanchent. Lorsque, au contraire, je veux mettre un terme à l’échange, il me suffit de répondre : « Question de travail, de discipline » ; cela clôt invariablement la conversation… Faites l’expérience, à l’occasion : elle est édifiante.

 

2 Commmentaires

  1. Agnès dit :

    Entièrement d’accord. La pssion est un moteur, certes. Elle ne peut cependant être vécue sans investissement de soi. La réussite n’est rarement autre que le fruit du travail.

  2. JAYET Vincent dit :

    Je crois pour ma part qu’il n’y a pas de talent sans travail. Le goût de l’effort, du travail bien fait et même la volonté d’en savoir plus sur un sujet, sont des choses qui se travaillent, se travaillent et se travaillent encore ! Cent fois sur le métier… Si ça n’a pas marché à la cinquantième fois, ça marchera peut-être à la soixantième !

    J’ai le souvenir d’un sociétaire de notre club de cyclisme qui, lors d’une sortie du dimanche, avait dit à propos d’un jeune qui venait de nous rejoindre et qui semble-t-il avait « quelques facilités à tourner les jambes, je cite « Le jeune là devant nous, avec son maillot d’une autre époque, il a des millions dans les jambes, mais le plus dur, ce sera de les faire sortir ! » et il avait raison ! Ce jeune avait du talent et de la classe et je me souviens l’avoir vu gagner bien des courses dans sa région, sauf que tout cela n’était pas arrivé par hasard, mais à force d’entrainement, d’abnégation, et d’un léger soupçon de souffrance et de sacrifice !

    Dans votre métier mon cher Franck, le travail et la passion sont les deux faces d’une même pièce. On ne peut apprécier l’un sans l’autre et l’on ne peut mesurer l’un sans l’autre. C’est parce qu’il y a beaucoup de travail qu’il y a de la passion en retour qui vous pousse à atteindre sans cesse la perfection. La passion est en quelque sorte l’arbre qui cache la forêt d’un travail acharné de recherche et de travail sur un sujet, c’est le travail qui donne toute sa valeur et son authenticité à la passion. Dans un monde où l’on zappe d’un sujet à l’autre en un éclair, la passion est le révélateur des hommes et des femmes qui se donnent tous les moyens d’en arriver à leurs fins : enthousiasmer les gens et leur faire découvrir de nouvelles choses, de nouveaux modes de pensées, de nouveaux mondes. Des passeurs de savoir…

    Cependant, n’oublions pas qu’il existe des métiers dans lesquels des hommes et des femmes travaillent comme des forcenés sans jamais voir ne serait-ce qu’un échantillon de ce que peut ressentir un travailleur acharné comme un Guillaume Gallienne (ah qu’elles doivent nécessiter des heures et des heures de préparation et de diction les émissions de M. Gallienne !) un Franck Ferrand ou encore un Philippe Delorme (superbe de travail son dernier livre sur « La mauvaise tête de Henri IV)

    Ces valeurs ne doivent pas se perdre et nous nous devons de les transmettre à nos enfants.

    Merci Franck pour tout le travail que vous accomplissez dans l’ombre des studios, pour le plus grand plaisir de nos oreilles et de notre imagination.

    « Le savoir ne vaut que s’il est partagé »

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